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    Cette façon de tomber, identique à la notre le jour de notre rencontre.

    - C'est pour la vie, disait-il en me tenant par la taille, juste après m'avoir embrassé.

    - Mais oui, disais-je d'une manière presque exaspérée. Pourtant c'était la première fois qu'on me disait une chose aussi belle, et si naïve.

    - Dis pas ça comme ça, je te posais pas une question. Je le sais. C'est pour la vie, répéta-t-il une dernière fois.

    Pour la vie. Pourquoi m'as-tu dit une telle chose? Avais-tu seulement conscience de l'impact de tes paroles? Je pense que oui, malheureusement. Je me repasse souvent ce moment dans ma tête. Et tout les autres. Le huit février, je crois que j'ai vécu la plus belle journée de ma vie, ou du moins l'une des plus belles. L'une de ces journées dont on se souvient longtemps, dans les moindres détails. Je me rappelle, j'étais arrivée à 15:35, sur la voie 5. Toi, tu n'étais pas là. Et comme on s'était rencontré sur internet, j'ai tout de suite pensé que tu ne viendrais pas, et que tu étais sans doute un faux profil. Là, je t'ai sonné, et pour la première fois tu as entendu ma voix. J'entendais rien avec les trains qui démarraient, alors je riais seule, je devais avoir l'air une folle à l'autre bout du fil. Et je répétais sans cesse "J'ai peur, ne viens pas, je vais reprendre le train pour rentrer, ne viens pas." Mais tu es venu. J'étais là à t'attendre la boule au ventre, assise tête baissée, à chanter la chanson "Dis-moi" de BB Brune. Et puis, en relevant la tête, je t'ai vu à côté de moi. Tu étais encore plus beau en vrai. Je me suis écriée "Oh, mais tu es réel!". Putain, j'avais l'air stupide. Puis j'ai posé ma cuisse sur la tienne et je t'ai embrassé, pas longtemps. Je voulais te regarder encore. Là tu m'as dis "Tu es magnifique". Et mon stress a disparu, j'avais vraiment peur que tu me trouves horrible. On est parti en direction du métro, j'osais pas encore te tenir la main. Je restais un peu en retrait, j'examinais les moindres détails. Tu avais une chemise en jeans, avec un jean moutarde et tu tenais ta veste à carreau. T'étais beau même de dos, même si je pouvais pas voir ta barbe de trois jours, ni tes petits yeux marrons, ou même tes cheveux bouclés que tu essayais de dissiper avec du gel. J'étais tellement fière de marcher avec toi, d'être ta copine. J'aurai pu le crier au monde entier. Ensuite, tu m'as dit de rester là, que je devais t'attendre. Et t'es revenu, t'avais deux chocolats chauds du Starbucks avec de la crème chantilly par dessus. T'avais pas oublié que j'adorais ça. En le buvant, j'avais réussi à m'en mettre entre les sourcils. Tu trouvais ça mignon, moi je me sentais encore stupide. Et là enfin, je t'ai pris la main. Ou peut-être que tu me l'as prise. On s'en fiche, c'était magique. Magique, on pourrait croire que c'est un trop grand mot. En fait, c'est rien comparé à ce que j'ai pu ressentir. Quand j'y repense.. Toi qui voulais pas que je vienne ce jour-là car les choses que tu avais prévu de faire étaient tombées à l'eau. Je regrette pas d'avoir suivi mon instinct. Je devais te voir, c'était une évidence. On peut pas passer à côté de ce qui pourrait être l'amour de notre vie. Je pense que tu l'es. Personne n'a jamais été aussi attentionné avec moi. Même si tu pouvais être chiant, comme quand tu m'as dit "Ah ouais? Tu crois que je peux pas tenir sans t'embrasser? On va voir, le premier qui craque a perdu!" Je pensais pouvoir gagner la partie, je me rappelle ce moment où tu es venu à 2 cm de mes lèvres, j'ai crié "T'as perdu!" Et j'ai voulu t'embrasser, puis tu m'as dis "Euh, je prenais juste mes clopes, elles sont là derrière toi". Et là, je pense que c'est la première fois que tu as rigolé pour du bon.. Ensuite on a parlé. Et on a fait l'amour. Je pense qu'aucun de nous deux pensait qu'on le ferait, surtout toi. On pensait pas non plus prendre une douche ensemble. D'ailleurs, ça n'avait rien de romantique, rien de comparable à ces passages qu'on envie dans les films. J'ai essayé de t'embrasser mais j'ai eu droit à m'prendre plein d'eau dans le nez. J'étais limite en train d'étouffer, et toi tu riais encore et encore. J'adore ton rire. J'adore ta voix tout simplement. J'aurai dû te remercier. Pas pour ça bien sûr, plutôt pour tout. Je regrette de ne pas t'avoir dit tout ce que je ressentais pour toi. J'étais juste capable de te dire je t'aime. Est-ce que c'était suffisant? Etait-ce suffisant après toutes ces horribles choses sur mon passé que je venais de t'avouer? J'oublierais pas tu sais. J'oublierais pas la manière dont tu m'as rassuré ce jour-là. Malheureusement, ma confiance s'évapore. J'ai besoin de toi. 

    La distance qui nous sépare est déjà tellement difficile à supporter, je voulais pas qu'on en crée une deuxième entre nous.